L'assurance dommages-ouvrage a été conçue comme une assurance à "double détente" :
- Elle assure le pré-financement des travaux de réparation des désordres de nature décennale dans des délais brefs et encadrés, sans recherche préalable des responsabilités.
- Puis, il appartient à l'assureur dommages-ouvrage d'exercer un recours subrogatoire contre les locateurs d'ouvrage concernés et leurs assureurs, une fois qu'il a indemnisé le maître de l'ouvrage.
Depuis plusieurs années, la Cour de cassation applique l'article L 121-12 du Code des assurances à l'assurance dommages-ouvrage.
Pour rappel, cet article dispose que :
"L'assureur qui a payé l'indemnité d'assurance est subrogé, jusqu'à concurrence de cette indemnité, dans les droits et actions de l'assuré contre les tiers qui, par leur fait, ont causé le dommage ayant donné lieu à la responsabilité de l'assureur.
L'assureur peut être déchargé, en tout ou en partie, de sa responsabilité envers l'assuré, quand la subrogation ne peut plus, par le fait de l'assuré, s'opérer en faveur de l'assureur.
Par dérogation aux dispositions précédentes, l'assureur n'a aucun recours contre les enfants, descendants, ascendants, alliés en ligne directe, préposés, employés, ouvriers ou domestiques, et généralement toute personne vivant habituellement au foyer de l'assuré, sauf le cas de malveillance commise par une de ces personnes."
L'arrêt rendu par la Cour de cassation le 25 mai 2023 précise les conditions d'application de l'alinéa 2 à l'assurance DO.
En l'espèce, un ouvrage avait fait l'objet d'une réception tacite le 8 septembre 2003.
Le 24 juin 2013, les propriétaires ont déclaré plusieurs désordres à l'assureur dommages-ouvrage qui, après un rapport préliminaire du 14 août 2013, complété par un second rapport du 3 février 2014, a formulé, le 5 février 2014 une proposition d'indemnisation partielle.
Les propriétaires ont, après expertise, assigné l'assureur DO en réparation de leurs entiers préjudices et celui-ci a alors exposé l'exception de subrogation de l'article L 121-12 du Code des assurances puisqu'au jour de leur proposition indemnitaire, aucun recours n'était plus possible contre les constructeurs et leurs assureurs.
La Cour de cassation rejette l'argument de l'assureur DO et retient que l'impossibilité du recours subrogatoire était due aux seuls délais d'instruction de la déclaration de sinistre prévus à l'article L 242-1 du Code des assurances, et ne relevait donc pas d'un fait de l'assuré.
L'assureur DO n'a donc pas démontré avoir été privé de son recours subrogatoire du fait de l'assuré.
Avec une telle décision, les assurances dommages-ouvrage auront sans doute intérêt à refuser tout garantie pour les sinistres déclarés en fin du délai de garantie décennale.